La principale figure de l’opposition zambienne, Hakainde Hichilema, et ses co-accusés ont été libérés mercredi 16 août 2017, après que l’Etat ait conclu à un non-lieu (le requérant ou le procureur décide d’interrompre les poursuites) dans l’affaire dans laquelle ils étaient accusés de trahison.
Leur libération est survenue après qu’Hichilema, président du Parti uni pour le développement national (UPND) ait passé quatre mois en détention, dans des conditions décrites par ses partisans comme déshumanisantes. La Procureure générale (PG) zambienne, Lilian Siyuni, a conclu mercredi matin à un non-lieu dans l’affaire dans laquelle Hichilema et cinq autres devaient comparaître en justice. La partie accusée a plaidé « non coupable » des chefs d’inculpation.
La libération d’Hakainde, que l’on appelle souvent HH, marque le début de la fin d’une impasse politique prolongée résultant sur de vives tensions politiques dans le pays, suite au refus de l’opposition d’accepter les résultats des élections générales d’août 2016. Cela est survenu après que leur requête déposée devant la Cour constitutionnelle ait été rejetée au motif d’un manque de temps, car les 14 jours stipulés dans la Constitutions étaient écoulés.
Le chef de l’UPND a été arrêté en avril, au cours d’une perquisition menée par la police à son domicile de Lusaka, la capitale du pays. Hichilema avait prétendument mis en danger la vie du président quand son cortège avait refusé de laisser passer un convoi présidentiel plusieurs mois plus tôt.
Hichilema et cinq autres étaient inculpés de trois chefs d’accusation : trahison, désobéissance aux ordres et utilisation d’un langage insultant. Le procureur de l’Etat abandonna le deuxième chef d’accusation, et le magistrat élimina le troisième, faisant mention de témoignages incohérents et montés de toutes pièces de la part d’officiers de police.
Les avocats de la défense avaient affirmé dans un premier temps que l’affaire ne devait pas être présentée devant la haute cour, l’officier ayant préparé le dossier du procès n’ayant aucune autorité pour ce faire. L’UPND a maintenu que les suffrages de 2016 étaient truqués en faveur du Président Edgar Lungu et du Front patriotique au pouvoir. Mais ils ont échoué à invalider les résultats en passant par les tribunaux.
Alors que HH était en prison, la pression locale et internationale exercée sur le gouvernement pour qu’il abandonne ses chefs d’accusation montait, le refus de son cortège de laisser passer le convoi du Président Lungu ne pouvant être cité comme une trahison, bien qu’il constitue le motif de son arrestation brutale ainsi que de celle de ses employés de maison.
Le Président Lungu proclama un état d’urgence, soutenu par le Parlement à un moment où les députés de l’opposition étaient absents, en réponse à ce qu’il décrivit comme des actes de sabotage suite à l’incendie du plus grand marché du pays, dans la capitale Lusaka.
La libération de HH a été négociée par le biais d’une intervention internationale soutenue, et atteint son apogée avec l’intervention de Patricia Scotland, Secrétaire Générale du Commonwealth, qui organisa une série de discussions avec le président zambien, Edgar Lungu, et son rival Hakainde Hichilema, quelques jours avant sa libération. Quelques jours avant la visite de Scotland en Zambie, l’ancien président nigérian Olusegun Obasango, organisa des discussions avec le président Lungu, ainsi qu’avec Hichilema, toujours en détention, affirmant après quoi que le fossé entre le président Edgar Lungu et Hakainde Hichilema, le chef de l’opposition, se comblait.
Le Général Obasanjo, qui s’était rendu en Zambie avec Jacob Zuma, le président sud-africain, s’est engagé à maintenir diffuses les tensions politiques en Zambie. Les autorités zambiennes se sont vivement opposées aux conseils émanant de la scène internationale sur la question de l’arrestation et de la détention du chef de l’opposition, affirmant que la Zambie était un Etat souverain. Mmusi Maimane, le chef de l’Alliance démocratique, le principal parti d’opposition en Afrique du Sud, a été l’une des victimes de cette décision, et a été déporté de force à l’aéroport à son arrivé pour assister au procès d’Hakainde Hichilema au tribunal de première instance de Lusaka.
« Je constate que le fossé entre Hakainde Hichilema, le chef de l’opposition, et Son Excellence le Président se comble, et je pense que nous pouvons faire avancer le pays et passer outre les problèmes de 2016. En tant qu’homme d’Etat africain d’un certain âge, je reste pleinement engagé à m’assurer que la paix et la stabilité progressent et que leur existence n’est pas menacée, non seulement en Zambie mais également dans les 53 pays que compte l’Afrique », a affirmé le Général Obasanjo.
Suite à la libération de HH, la Secrétaire Générale du Commonwealth a décrit la décision de Lilian Siyuni, la Procureure générale, de conclure à non-lieu dans l’affaire de la condamnation de Hakainde Hichilema, le chef de l’UPND, pour trahison, comme raisonnable.
Elle a annoncé la nomination du Professeur Ibrahim Gambari, diplomate nigérian, comme son envoyé spécial pour le dialogue en Zambie. Scotland a affirmé que la libération du chef de l’opposition était une occasion pour le pays d’avancer dans l’intérêt de tous les Zambiens, et de réaliser la cohésion politique et la réconciliation par le dialogue.
« La décision de la Procureure générale de prononcer un non-lieu dans l’affaire contre M. Hichilema est raisonnable et offre une occasion unique au pays d’aller de l’avant dans l’intérêt de tous les Zambiens, et de parvenir à la cohésion politique et à la réconciliation par le dialogue. La Procureur générale, en tant que gardienne de l’intérêt public et de l’Etat de droit, doit avoir examiné ce qui était dans l’intérêt de la justice et de l’intérêt public en cette période délicate de l’histoire de la Zambie et décidé que, en ce moment important, il n’était pas dans l’intérêt du peuple de poursuivre le chef de l’opposition, notamment suite à l’engagement à la paix et à l’harmonie que le Président Lungu et M. Hichilema m’ont généreusement accordé au cours de ma récente visite en Zambie, et à leur engagement à prendre part à un dialogue constructif, responsable et prometteur pour l’avenir.

« Elle a ajouté que la libération d’Hichilema constituait une opportunité pour les Zambiens et leurs dirigeants de montrer au reste du monde que le pays restait un symbole de paix et un modèle de stabilité, d’unité et de tolérance politique en Afrique et dans le Commonwealth », a affirmé Scotland.
Au moment de sa libération, Hakainde a déclaré qu’il était dix fois plus fort qu’avant et ne connaîtrait pas de repos tant que les autres sympathisants du parti restés en détention dans le pays ne seraient pas libérés.
Jack Mwiimbu, conseiller juridique de l’UPND, a insisté sur le fait que l’affaire du droit à être entendu devant les tribunaux ne serait pas abandonnée, alors qu’ils se battent pour que leur requête de contestation des élections soit entendue.