Peur sur un scrutin. Oui, celui du 31 octobre 2020 en Côte d’Ivoire donne de grosses frayeurs aux populations ivoiriennes. Bien que cette date soit constitutionnelle, elle cristallise et attise toutes les tensions…

En Côte d’Ivoire, la compétition pour le fauteuil présidentiel divise une fois de plus la classe politique nationale. Alors que le pouvoir actuel assure que le scrutin sera bien sécurisé, les populations, elles, craignent une montée des violences, surtout face à l’appel à « la désobéissance civile » lancé par l’opposition.

L’absence de consensus

La candidature du président sortant, bien que validé par le conseil constitutionnel, ne fait pas l’unanimité au sien de la classe politique ivoirienne.

À l’issue des dépôts des déclarations de candidatures, seulement 4 candidatures, dont celle du président sortant, ont été validées sur les 44 dossiers soumis. Les 40 autres candidatures ont été invalidées pour entre autres : défaut de parrainages, non-paiement du cautionnement de 50 millions, absence sur la liste électorale.

Parmi les candidatures jugées irrecevables, figurent celles de l’ancien président de la République Laurent Gbagbo (2000 – 2010) et de l’ex-président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro.

Les deux principaux candidats de l’opposition en lice, Henri Konan Bédié – ancien président de la République (1993 – 1999) et président du Pdci (Parti démocratique de Côte d’Ivoire) – et Pascal Affi N’Guessan, du Front populaire ivoirien (Fpi), ont décidé de faire front commun contre la candidature du président sortant.

Un appel à la « désobéissance civile » a été lancé pour empêcher la tenue effective de l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. Cela a déjà suscité des manifestations dans plusieurs localités de la Côte d’Ivoire, le blocage de la distribution par la CEI (Commission électorale indépendante) des cartes d’électeurs dans nombre de zones sur l’étendue du territoire national. L’opposition est formelle et soutient que le scrutin présidentiel du 31 octobre n’aura pas lieu.

La peur gagne du terrain

Dans ce contexte tendu, le gouvernement a lancé une opération de sécurisation de l’élection baptisée « Barrissement de l’éléphant ». L’opération, déployée le 25 octobre 2020 et prévue pour s’achever le 3 novembre 2020, mobilise environ 35 000 agents des forces de l’ordre et de sécurité. Policiers, gendarmes et soldats composent l’effectif de cette opération.

Les populations, de leur côté, sont dans la tourmente. Si le dispositif sécuritaire rassure certains, d’autres redoutent et craignent une fois de plus l’escalade de la violence, 10 ans après la crise post-électorale qui a officiellement fait 3000 morts.

« C’est plus par peur que je n’irai pas voter, je sais que de toutes les façons, il y aura des remous dans les bureaux de votes. Où ? précisément, je ne sais. Donc je pense que c’est plus sécurisé pour moi de rester à la maison. De l’autre côté ni les uns, ni les autres n’ont réussi à nous démontrer que si une personne décide d’aller voter, on pourra respecter son droit de vote. Qu’on soit d’accord avec les élections, qu’on ne soit pas d’accord avec les élections, je pense qu’en tant que citoyen, on a tous le droit de faire un choix. Le choix d’aller voter ou de ne pas aller voter. Or, dans le cas d’espèce, ni l’opposition ni le parti au pouvoir n’ont montré de prédispositions à pouvoir garantir à chacun ce droit. Et même quand on quitte la sphère des querelles entre le parti au pouvoir et l’opposition, au sein même de la société, il n’y a plus de place pour la voix du milieu. Ce sont les positions tranchées. », affirme Rokia Touré, étudiante, 32 ans.

Ce samedi 31 octobre 2020 marquera sans nul doute un tournant décisif dans l’histoire de la Côte d’Ivoire. Le pays retient son souffle avec le regard tourné vers les acteurs et partis politiques.