À l’arrivée de Félix Tshisekedi au pouvoir en RDC, tout le monde a cru que le pays à tourné la page sombre du régime de Joseph Kabila. Le nouveau président s’est illustré par de bons signaux de décrispation du climat politique : fermeture des cachots clandestins, libération des prisonniers politiques, ouverture des médias publics à l’opposition, retour des exilés politiques, etc. De bons signaux certes, mais ça s’est arrêté là.
Le respect des libertés publiques est toujours un thermomètre de la bonne santé d’une démocratie. Or, le président Félix Tshisekedi semble désormais décidé à durcir son régime. Les arrestations, les coups de matraques et les gaz lacrymogènes sont de retour dans nos rues pour réprimer les manifestations publiques. Il n’y a pas longtemps, des manifestants du mouvement citoyen Lutte pour le changement Lucha ont été tabassés à coupsde matraques par la police à Goma pour avoir osé protester contre la mauvaise qualité des services de l’entreprise de télécommunication Airtel en République démocratique du Congo. Les vidéos de la bastonnade ont fait le tour du monde sur les réseaux sociaux, montrantdes militants de la Lucha blessés. Et ce n’était qu’un début de la répression en plein nouveau régime.
Le comble c’est lorsque le président Félix Tshisekedi déclare lui-même qu’il soutient l’interdiction de la marchepacifique de la coalition de l’opposition Lamuka prévue le 30 juin 2019. Le chef de l’État évoquait comme motif le fait que selon lui il se produit « des débordements » lors des manifestations de l’opposition. Ah bon ! Or, les débordements il y en a toujours lorsque des masses de gens descendent dans la rue. Ce n’est pas une raison pour interdire les manifestations publiques. La police doit simplement jouer son rôle d’encadrer les manifestants pour empêcher les débordements.
Le président Félix Tshisekedi a-t-il oublié si vite que les dérapages, il y en avait aussi quand il était opposant et que les membres de son parti UDPS jetaient des pierres sur les policiers, brûlaient des pneus et saccageaient des sièges d’autres partis politiques ?
Le 30 juin 2019, malgré l’interdiction de sa marche pacifique, l’opposition menée par le candidat malheureux à la présidentielle (Martin Fayulu qui revendique toujours la victoire) est bel et bien descendue dans les rues à Kinshasa, Goma et Kikwit. Comme on s’y attendait, la marche a été dispersée à coups de gaz lacrymogènes. Un manifestant a été tué par balle à Goma. À Kinshasa, des policiers ont même crevé volontairement les pneus de la jeep de Martin Fayulu pour le bloquer et empêcher le cortège de progresser. Le chef de la police de Kinshasa, le général Sylvano Kasongo a assumé l’acte de ses hommes. « J’ai reçu l’ordre des autorités d’empêcher la marche », pouvait-on l’entendre déclarer sur les médias. Pourtant, les manifestations publiques sont garanties par la Constitution congolaise.
Bref, le pays de Lumumba est encore loin de devenir un véritable État de droit. La lueur d’espoir que nous a fait miroiter le nouveau régime semble s’éteindre. Car les mêmes méthodes anti-démocratiques du temps de Joseph Kabila sont revenues : interdiction des marches pacifiques, fermeture des médias, coup de matraques, gaz lacrymogènes, tirs à balles réelles…
Non. Le président Félix doit réellement engagé le pays dans le vrai changement qu’il avait toujours promis. Il ne devrait pas oublier si vite le slogan favori de son défunt père Étienne Tshisekedi : le peuple d’abord !