Suite aux derniers événements de violences inouïes en Tunisie, une bonne partie de la colonie ivoirienne a décidé de quitter ce pays pour retourner chez eux en Côte d’Ivoire. Ils en sont au 7ème vol à eux affrétés par le pouvoir ivoirien à ce jour. Mais cette disposition ponctuelle des gouvernants ivoiriens règle-t-il vraiment le problème de fond de sa jeunesse ?
La cohabitation entre les Tunisiens et les migrants Subsahariens n’est plus au beau fixe. Elle s’est sérieusement désagrégée voire dégradée récemment suite à d’inouïes violences verbales et physiques des Tunisiens à leur encontre. Situation d’incertitude, et même de crise qui a engendré beaucoup de départs volontaires de ces ressortissants de l’Afrique de l’Ouest dans leurs pays d’origine respectifs.
Le pouvoir ivoirien n’a pas attendu trop longtemps pour affréter un avion à ses ressortissants qui désirent rentrer volontairement dans leur pays. Depuis l’éclatement de l’affaire à ce jour, sept vols pour l’instant, selon une source bien introduite, en direction de la Côte d’Ivoire ont été effectués. Et c’est entre 150 à 200 Ivoiriens et Ivoiriennes qui partent de la Tunisie par ces vols. Et ce n’est pas fini. » Le président, Alassane Ouattara, dit que tant que des Ivoiriens voudront rentrer volontairement chez eux, un avion sera toujours mis à leur disposition », confie DF, un Ivoirien résidant en Tunisie. Notre source va plus loin pour expliquer la crise.
« C’est vrai que certains Tunisiens n’aiment les Africains noirs que nous sommes. Mais cette crise est partie du mauvais comportement de nos frères noirs ici. Ça ne veut pas dire que je soutiens ce qui s’est passé. En fait, tout est parti de trois mauvais actes posés par nos frères noirs ici en Tunisie. Ils ont d’abord agressé une femme tunisienne à son domicile. Ensuite, ils ont agressé un couple. La femme est décédée des suites de ses blessures au couteau avant de prendre un enfant de neuf (9) ans en otage et de demander une rançon à ses parents. C’est quand la police a arrêté ces auteurs-là que les Tunisiens se sont révoltés. Ils ont estimé que nous sommes devenus dangereux pour leur intégrité physique dans leur propre pays. Voilà comment ils ont commencé à nous agresser à tout vent. Je précise que ces agressions perpétrées ne sont pas du fait des Ivoiriens. Ce sont surtout nos frères qui arrivent de Libye sans ressources qui s’adonnent à ce genre de choses »
L’affaire a pris une telle ampleur sociale, et même politique que le président tunisien, Kais Saied, s’en est fendu d’une sortie d’une rare hérésie. Pour le premier citoyen tunisien, la présence d’Africains subsahariens a « pour objectif premier de changer la composition démographique de la Tunisie ». D’où » Les mesures urgentes » qu’il a arrêtées contre l’immigration clandestine.
Une position au plus haut niveau de l’état qui a ouvert les vannes à une série de violences sur les Subsahariens il y a peu. Si beaucoup de Tunisiens ont épousé la position de leur président, elle n’a cependant pas rencontré l’assentiment de tous les Tunisiens, dont le cinéaste, Youssef Chebbi, étalon d’or au dernier Fespaco au Burkina Faso. Sur la question, l’artiste ne s’embarrasse pas de fioritures. »
Il est impossible d’ignorer la dangereuse et insensée dérive raciste et sécuritaire qui se déroule aujourd’hui en Tunisie. Les dirigeants ont raté l’occasion d’élever notre société vers la dignité humaine et la fraternité aux yeux du monde. C’est un détournement honteux qui nous enseigne sur leur profonde incompétence ».
L’Union africaine (UA), à son tour, s’est carrément désolidarisée de la position du président tunisien. Le communiqué publié à cet effet et émanant du président de la commission de cette institution, Moussa Faki Mahamat, est sans équivoque. Il a d’abord appelé ses états membres à « s’abstenir de tout discours haineux à caractère raciste susceptible de nuire aux personnes » avant de » Condamner fermement les déclarations choquantes faites par les autorités tunisiennes contre des compatriotes africains, qui vont à l’encontre de la lettre et l’esprit de notre organisation et nos principes fondamentaux ».
Alors question ; de quelles politiques sociales réelles, sociétales ou économiques disposent ces pays subsahariens pour éviter à leurs ressortissants de choisir d’aller trimer à l’étranger au lieu de se réaliser chez eux ? À la vérité, rien. Tout le problème de fond est là. L’écrasante majorité des jeunesses de ces pays préfère aller souffrir à l’étranger que de demeurer d’éternels souffre-douleur chez eux. Et ce n’est pas un secret. 98 % des ressortissants subsahariens qui résident en Tunisie y sont en transit pour « l’Eldorado » européen. Ils vont chercher le bien-être que leurs propres pays n’arriveront peut-être jamais à leur offrir. D’où cette farouche volonté à braver tous les coriaces obstacles et dangers dans le désert du Niger, de la Libye, au prix de leurs vies. Juste pour fuir la misère locale.
Les états subsahariens sont donc responsables de ces vies de leurs ressortissants livrées à bas prix à la mort. Des États dont les sous-sols sont riches, les dirigeants riches, mais dont les populations restent dans la précarité de générations en générations.
La gestion des pouvoirs en Afrique et particulièrement en Afrique subsaharienne demeure une grosse énigme. Un débat qui mérite d’être mené. De fond en comble.
Maria de Dieu