Alors que les massacres ont redoublé d’intensité ces dernières semaines dans l’est de la République démocratique du Congo, les voix s’élèvent pour dénoncer ces carnages sans fin dont les populations sont victimes,  notamment dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. La Conférence épiscopale nationale du Congo, structure regroupant les évêques catholiques, n’est pas demeurée en reste. Elle a lancé cette phrase : « Arrêtez de tuer vos frères ! »

Dans un message rendu public le 08 avril dernier, les évêques déplorent la persistance des tueries dans l’est du Congo. Selon eux, « les assaillants se servent des points faibles des Forces armées régulières pour parvenir à leur but politique ou religieux, notamment : l’occupation des terres, l’exploitation illégale des ressources naturelles, l’enrichissement sans cause, l’islamisation de la région au mépris de la liberté religieuse… ».

Pendant ce temps, toujours pas de gouvernement en RDC

Tout le monde espère la mise en place du nouveau gouvernement avec de nouvelles directives pour mettre fin à l’activisme des groupes armés dans le pays, mais voici deux mois environ que le nouveau Premier ministre n’a toujours pas publié la composition de son gouvernement. Pendant ce temps, la situation est explosive dans l’Est. Si rien n’est fait, cette partie du pays risque de devenir ingouvernable.

Malgré la présence massive des éléments des Forces armées de la RDC et des casques bleus de la Monusco, les tueries attribuées aux ADF continuent comme si de rien n’était. Pour les évêques, cette situation a endeuillé plusieurs familles, entrainé des déplacements massifs des populations, causé des pertes importantes de biens et porté un coup dur à l’économie de la région. « Les victimes se comptent par milliers : plus de 6 000 morts à Beni depuis 2013 et plus de 2 000 à Bunia pour la seule année 2020. On compte également au moins 3 millions de déplacés et environ 7 500 personnes kidnappées », indique le message de la Cenco.

Plus grave, les évêques congolais accusent les auteurs des massacres de véhiculer « une idéologie proche du satanisme » !

Pourquoi l’armée n’arrive pas à bout des groupes armés ?

En plus de l’absence de l’autorité de l’Etat, le comité permanent de la Conférence épiscopale nationale du Congo pointe du doigt les causes à la base de l’inefficacité des Forces armées de la RDC déployées dans cette région. Ces causes sont :

  1. Une sédentarisation de certains officiers qui sont restés longtemps dans la région et s’opposent à être déployés ailleurs ;
  2. La modicité et le détournement de la solde des militaires de rang et de leur ration, d’où l’amenuisement de leur motivation ;
  3. Une mauvaise gestion des effectifs, tantôt insuffisants, tantôt fictifs : ceux qui tombent au front ne sont ni recensés ni déclarés ;
  4. Une grande infiltration des éléments étrangers à la faveur des opérations de brassage et de mixage ; cf. cas du Procès de Bosco Ntaganda.
  5. La présence des anciens rebelles du RCD, du CNDP et du M23 dans les rangs des militaires engagés dans les opérations à l’Est et soupçonnés de complicité avec l’ennemi.
  6. L’affairisme de certains officiers, plus soucieux du business que de la conduite des opérations militaires.
  7. Une forte porosité des frontières qui facilite des entrées nocturnes d’hommes armés provenant des pays voisins.

A noter qu’il existe actuellement une vive tension à Beni et à Butembo. Les mouvements citoyens et les organisations de la société civile ont décrété 10 jours de grève générale pour dénoncer l’insécurité qui bat son plein dans cette partie de la République démocratique du Congo. Une messe a été organsée le 08 avril au stade Matokeo de Butembu pour implorer la miséricorde divine sur la ville de Beni en proie aux massacres de civils.