Fini le mutisme des femmes sur les réseaux sociaux. L’année 2020 aura été sans nul doute, en Afrique de l’Ouest, l’année où les femmes ont compris et saisi l’opportunité qu’offrent les réseaux sociaux. Autrefois timorées, très peu réactives sur certains sujets et débats sur la toile, les femmes prennent de plus en plus la parole sur des sujets qui les concernent.

Que ce soit au Benin, au Mali, au Burkina Faso, en Guinée, au Sénégal ou encore en Côte d’Ivoire les ‘’femmes ne sont plus seules.’’ Les féministes ont investi les réseaux sociaux, notamment Facebook et Twitter pour faire entendre désormais leurs voix.  Elles y font la promotion des droits des femmes et amplifient les voix de celles qui sont victimes de violences physiques et sexuelles.

Une gigantesque chaine de solidarité humaine se développe pour lutter contre les inégalités, les violences basées sur le genre et défendre les droits des femmes et des filles. En effet, de nombreux combats de femmes victimes de violences physiques et sexuelles ont été concluants au cours de l’année dernière grâce aux réseaux sociaux.

On pourrait citer entre autres, en Côte d’Ivoire, l’affaire de violences conjugales à Yopougon et au Mali l’affaire Sidiki Diabaté qui a suscité une mobilisation active des féministes autour des hashtags comme #jesuismamacita, #boycotSidikiDiabate et l’arrestation au Benin d’un internaute à la suite d’une publication visant à faire l’apologie de la pédocriminalité.

 

Un féminisme très audacieux  

De plus en plus de jeunes se revendiquent féministes et l’assument sur les réseaux sociaux. Pour Maimouna Dembélé, féministe Malienne, c’est un fait extraordinaire. Il y’a quelques années, les défenseurs des droits des femmes assumaient rarement, sur le terrain, le fait qu’ils soient féministes. « Le féminisme 2.0 est un féminisme très audacieux. Il faut avoir assez d’audace pour évoquer certains sujets et tenir un certain discours qui serait difficile sur le terrain. Nos détracteurs disent qu’au lieu de militer sur les réseaux sociaux, ce serait mieux d’aller sur le terrain. Mais, Facebook ou les autres plateformes nous permettent de toucher un public diversifié, de donner de l’information et de susciter le débat. », affirme Maimouna Dembélé.

Nous assistons à l’émergence d’une nouvelle génération de femmes africaines qui s’assument et revendiquent publiquement leur appartenance à un courant de pensée qui n’est pas encore bien perçu en Afrique. C’est l’un des changements majeurs de l’année 2020.

Si la cause est noble, leur engagement est encore incompris et mal perçu. « De nombreuses féministes 2.0 font du pastiche en voulant combattre des réalités locales avec des prismes occidentaux. Nos sociétés ont des modes de fonctionnement et des pratiques qui vont changer progressivement. Ça sera lent, mais le changement est déjà en marche. On ne peut pas rester sur les réseaux sociaux et espérer faire changer des gens qui n’y ont pas accès. » soutient, cependant, Ladji Siratigui, Blogueur.

« Féministe 2.0 », « Pseudo féministe », « féminisme Wouya Wouya[1] », ce sont autant de sobriquets que les féministes portent désormais avec fierté.

L’un des défis majeurs du mouvement féministe en Afrique serait aujourd’hui d’amener le maximum de personnes à d’adhérer à la lutte contre les inégalités, que ce soit en milieu rural ou en milieu urbain.

 

[1] Féministe à deux balles

Crédit Photo : Ousmane Makaveli