A son arrivée au pouvoir en RDC, Félix Tshisekedi avait suscité beaucoup d’espoir en matière des libertés publiques et respect des droits de l’homme. Hélas, l’accalmie n’aura été que de courte durée. Le pays a repris ses vieilles habitudes de répression contre les opposants et les journalistes. Des habitudes qui étaient une norme sous l’ancien régime de Joseph Kabila.
Kinshasa : mercredi 15 septembre 2021. La coalition Lamuka de l’opposant Martin Fayulu (qui revendique toujours sa victoire à l’élection présidentielle de 2018) descend dans la rue pour une marche pacifique. Elle exige la dépolitisation de la Commission électorale congolaise, ainsi que la tenue des prochaines élections dans le délai constitutionnel. Malgré le fait qu’elle est pacifique, la marche est interdite par les autorités.
Le gouverneur de Kinshasa, Gentiny Ngobila, justifie l’interdiction en prétextant le risque de propagation du Covid-19. Une raison qui ne tient pas debout quand on sait que les proches du régime organisent des manifestations presque tous les jours sans être inquiétés ; les marchés, les bars et les églises ouvrent avec plein de monde…
Les brutalités policières
Le matin du mercredi, le message du chef de la police de Kinshasa, le général Sylvano Kasongo, passe en boucle sur les médias : « Tout attroupement de plus de cinq personnes sera dispersé par la police ! » Pourtant, malgré l’interdiction, les opposants Martin Fayulu, Adolphe Mozitu et quelques uns de leurs partisans décident de commencer leur marche pacifique. Point de rassemblement : le quartier Pascal dans l’est de la capitale. Mais sur place, le dispositif de la police est impressionnant. Les militants tentent de faire face et de résister, mais pas pour longtemps. Ils sont dispersés à coup de matraques et de gaz lacrymogène.
L’opposant Martin Fayulu est brutalisé avant d’être escorté pour l’éloigner du lieu de la manifestation. Il dénonce ce qu’il appelle « la barbarie » du régime de Félix Tshisekedi. Certains de ses militants crient : « Nous voulons un changement dans ce pays. Nous souffrons beaucoup. Il faut un changement ! » En peu de temps, la marche pacifique est étouffée.
Les journalistes en paient les frais
Les policiers n’aiment pas qu’on filme les brutalités qu’ils commettent sur les civils. À cette marche pacifique de Lamuka, ils n’hésitent pas à s’en prendre aux journalistes venus couvrir. Patient Ligodi, correspondant de RFI est violenté, tabassé et brutalement jeté dans un véhicule de la police. Il sera ensuite relâché et conduit à l’hôpital. D’autres journalistes ont vu leurs matériels de reportage ravis ou détruits.
Ainsi se porte la liberté de la presse et de manifestation en République démocratique du Congo. Dans la soirée de mercredi, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement présente ses excuses au journaliste Patient Ligodi et promet de poursuivre en justice les auteurs des violences. Quant à la coalition Lamuka, elle annonce qu’elle organisera d’autres marches pacifiques.
Le président Félix Tshisekedi dit prôner la démocratie et l’Etat de droit en République démocratique du Congo. Mais sur le terrain, en matière des libertés publiques, c’est tout le contraire. Cette énième interdiction de la marche de l’opposant Martin Fayulu en est un des exemples.