Le colonel Eddy Kapend aura passé 20 ans en prison avant de bénéficier d’une grâce présidentielle accordée par le chef de l’Etat congolais Félix Tshisekedi le 31 décembre 2020. Il est sorti de la prison centrale de Makala une semaine après. La nouvelle a fait l’effet d’une bombe partout en RDC.

L’ancien président congolais Laurent Désiré Kabila a été tué par balle le 16 janvier 2001 dans son bureau du Palais de Marbre à Kinshasa. L’enquête a pointé du doigt un des gardes du corps du président, notamment le soldat Rachidi. Il a été abattu immédiatement alors qu’il tentait de fuir après avoir tiré sur Laurent Kabila. A l’époque, le colonel Eddy Kapend était l’aide de camp du président.

Mais lorsqu’un événement malheureux comme un assassinat arrive à un chef d’Etat, la logique voudrait que ses proches soient préventivement arrêtés pour des raisons d’enquêtes. Le jour de la mort de Laurent Kabila, le colonel Eddy Kapend est passé à la télévision nationale pour appeler l’armée, la population et les forces de sécurité au calme. Cet acte sera interprété comme une tentative de coup d’Etat. Le colonel fut arrêté avec plusieurs autres personnes considérées comme impliquées dans l’assassinat du président. Le 7 janvier 2003, la haute Cour militaire les condamnera tous à la peine capitale.

Ce n’est pas lui l’assassin du président

Le procès Eddy Kapend et compagnons n’avait pas convaincu les ONG de défense des droits de l’homme. La plupart estimaient que les accusés n’étaient que des boucs émissaires. Eddy Kapend lui-même ne cessait de clamer son innocence. Certains proches de Kabila fils étaient du même avis. C’est le cas de l’ancien vice-président congolais feu Yerodia Abdoulaye Ndombaxi qui a déclaré en substance : « Je ne suis pas sùr que ceux qui sont en prison soient les vrais coupables de l’assassinat de Mzee Kabila. Mais on ne peut pas les libérer, à moins de trouver une solution de rechange… »

Malgré cette incertitude, Eddy Kapend et ses compagnons ont été maintenus en prison et n’attendaient que l’annonce de la date de leur exécution en tant que condamnés à mort. Pendant plus de 10 ans, les ONG ont continué à appeler à leur libération mais sans succès. Au cours de 18 ans de régime de Joseph Kabila, les condamnés du procès de l’assassinat de Laurent Désiré Kabila ont été exclus de toutes les mesures d’amnisties et de grâce présidentielle accordées à différents prisonniers.

Espoir et libération à l’avènement de Félix Tshisekedi

Après son arrivée au pouvoir le 24 janvier 2019, Félix Tshisekedi a libéré tous les prisonniers politiques et fermé les cachots clandestins de l’ancien régime. Mais le colonel Kapend et ses coaccusés ne pouvaient être considérés comme des prisonniers politiques. La réputation d’assassins d’un chef d’Etat ne leur laissait aucune chance. Ils ont dû attendre le 30 juin 2020 pour bénéficier d’une commutation de peine par le président Tshisekedi. Leur peine de mort a été commuée en prison à vie. Du coup, l’espoir d’être éligibles à une amnistie ou une grâce présidentielle n’était plus à écarter.

Pendant ce temps, les défenseurs des droits de l’homme n’ont pas arrêté d’interpeller le président Tshisekedi sur le sort d’Eddy Kapend. C’est le cas du célèbre activiste congolais Jean-Claude Katende qui, le 21 décembre dernier, a publié un tweet : « Je plaide encore pour que le président Félix accorde la grâce présidentielle à l’occasion des fêtes de fin de l’année à Eddy Kapend et ses compagnons. L’année prochaine ils feront 20 ans de prison. C’est trop pour des gens condamnés à l’issue d’un procès injuste. »

Et c’est le 31 décembre que le colonel Kapend et ses coaccusés ont été graciés par Félix Tshisekedi et ils ont quitté la prison le vendredi 08 janvier 2021.