Malgré les situations délicates qui ont parfois résulté de la volonté de certains dirigeants Africains à se maintenir au pouvoir, de nombreux chefs d’États caressent toujours le rêve de prolonger leurs mandats.
Le 26 août 2022, Faustin Archange Touadéra, président de la République Centrafricaine a créé par décret un comité chargé de rédiger le projet d’une nouvelle constitution. Selon l’avis de nombreux observateurs de la scène politique centrafricaine, il s’agissait pour le président qui arrive en fin de mandat, de trouver un moyen de faire sauter le verrou des limitations.
Les mandats de trop
En RCA, la tentative de modification de la constitution a donné lieu à une bataille entre le pouvoir et le Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC), une coalition constituée de partis d’opposition.
Le 23 septembre 2022, lorsque la cour constitutionnelle saisie par le BRDC a, par la voix de sa présidente Danièle Darlan, jugé inconstitutionnel la mise en place d’un Comité Chargé de réécriture d’une nouvelle constitution, certains ont cru que la série était terminée. Loin s’en faut : un décret présidentiel viendra quelques semaines plus tard destituer la présidente de le la cour constitutionnelle, annonçant clairement que le gouvernement n’avait pas l’intention d’en rester là avec son projet de modification de la constitution.
Ce qui se passe actuellement en Centrafrique n’augure rien de bon pour la suite. De nombreux pays Africains aujourd’hui instables, sont eux aussi passés par la case troisième mandat. En Guinée par exemple, la décision du président sortant Alpha Condé de rempiler pour un troisième mandat avait entraîné le pays dans des troubles qui ont coûté la vie à de nombreux Guinéens.
Contrairement à la Centrafrique, les recours déposés par l’opposition ont tous été rejetés par la Cour Constitutionnelle guinéenne, ce qui a permis à Alpha Condé de se représenter et d’être proclamé président en novembre 2020. Aujourd’hui, la Guinée est dirigée par une junte conduite par le colonel Mamadi Doumbouya, un chef militaire qui a renversé Alpha Condé en septembre 2021. Il faut dire que le contexte sociopolitique ne s’est pas forcément amélioré sous la junte.
La perche tendue aux militaires
Dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, les tentatives de s’enraciner au pouvoir ont ouvert le boulevard aux militaires qui se sont à chaque fois sentis obligés de prendre les choses en main et d’expulser les dictateurs. Par la suite, on se retrouve dans des transitions interminables, et une gestion parfois pas très différente de celle des présidents qu’ils ont remplacés.
Salués pour avoir débarrassé le pays d’Alpha Condé, la junte guinéenne semble aujourd’hui tomber dans les mêmes travers que l’ancien président. La récente tentative de suspension du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), accompagnée de l’arrestation et la détention abusive de ses leaders le montre à suffisance.
Au Burkina Faso, le lieutenant-Colonel Paul-Henri Damiba, qui était arrivé au pouvoir en janvier 2022 par un coup d’État, a lui aussi été dégagé le 2 octobre 2022 par un autre militaire, le capitaine Ibrahim Traoré. Dans ce contexte, il est à craindre que le pays sombre dans une spirale de coups d’États, et que le pays ne retrouve pas sa stabilité de sitôt.
Apprendre des erreurs des autres
Autant le dire, l’entêtement de leurs dirigeants à s’éterniser au pouvoir crée plus de problèmes qu’il n’apporte de solutions. Il est étonnant que, malgré tous les problèmes causés par ces coups d’état constitutionnels, des chefs d’États envisagent encore se briguer des mandats supplémentaires en violation des lois et au détriment de la sécurité et du bien-être de leurs populations.
Nos dirigeants devraient tirer les leçons de ce qui s’est passé en Burkina Faso, en Guinée, au Mali etc. et mettre l’intérêt des citoyens au-dessus de leurs intérêts personnels. Tandis qu’en RCA le président Touadéra est passé à l’offensive, la société civile Sénégalaise se mobilise pour empêcher que Macky Sall de se représenter.
Photo : AMISOM/Iwaria