Le compte à rebours jusqu’aux élections de 2021 en Ouganda est lancé. Des lois ont été amendées et les campagnes battent leur plein. NRM, le parti au pouvoir, a déjà annoncé son candidat.
Bobi Wine, alias Robert Kyagulanyi, a également annoncé son intention de se présenter.
Jeudi dernier, le célèbre musicien devenu homme politique est apparu aux heures de grande écoute sur une chaîne de télévision locale dans l’émission Politics Talk Show. Bobi Wine était interviewé par Patrick Kamara sur NTV. Je n’ai pas regardé l’interview. Cela fait longtemps que je n’ai pas eu le courage de m’asseoir pour regarder la télévision, car je souffre d’une anxiété légère, et ce pays, ainsi que le monde aujourd’hui, peuvent nous plonger dans cet état.
Plus sérieusement, loin est l’époque où regarder les actualités à la télévision constituait pour moi le moment agréable de mes soirées. Je me suis réveillé au son des plaisanteries le lendemain matin. Les statuts WhatsAppressemblaient à ceci : content d’avoir regardé Dansl’Embarras hier soir. Puis venaient les vidéos.
Bobi Wine était interrogé sur la politique fiscale nécessaire pour freiner l’inflation. Il a répondu qu’il éliminerait la taxe OTT (taxation des médias sociaux). A la question de savoir si cela contribuerait à la croissance du PIB, il a répondu en citant un rapport du Guardian parlant de 2 millions de personnes exclues d’Internet à cause de la taxe OTT, et parce que l’Ouganda a un taux de chômage très élevé chez les jeunes, ces derniers travaillent à leur propre compte en utilisant Internet.
Des réponses de débutant qui ont incité l’élite des médias sociaux à le critiquer en ligne – comment pouvez-vous vous présenter aux élections présidentielles si vous ne pouvez pas répondre à une question sur l’économie ; des camps opposés se sont donc constitués pour savoir s’il devait ou non être pris au sérieux.
Ces événements récents m’ont incité à réfléchir à quelques questions.
Le populisme
TMS Ruge@tmsruge
Le populisme aboutit rarement à une politique et une gouvernance saines. En particulier, si le candidat est novice en la matière. Cela ne veut pas dire qu’il ne se montrera pas à la hauteur s’il dispose du bon cabinet. Faites preuve de prudence.
Lydia Namubiru@namlyd
Bobi Wine a le pouvoir charismatique des célébrités pour remporter le vote populaire mais ses positions politiques doivent être développées. Si nous considérons la transition après Musevini comme un projet collectif, ceux qui ont passé des années à critiquer le NRM et à proposer une autre politique, chercheront à profiter de sa haute destinée.
Bobi Wine n’appartient à aucun parti. Mais il bâtit un mouvement qui est devenu très populaire chez les jeunes – People Power. Il est devenu très populaire après avoir remporté un siège au Parlement et souhaite se présenter aux élections présidentielles en 2021. Le FDC, premier parti de l’opposition, n’est plus tellement populaire dans certaines régions – mais ces personnes s’identifient au People Power. En conséquence, elles votent pour tout individu soutenu par Bobi Wine. C’est ce qui s’est produit à Arua, Kassiano Wadri ayantremporté les élections législatives alors qu’il était en prison avec Bobi Wine.
Mais chaque fois que je pense au populisme, je me souviens de mes deux dernières visites en Tunisie. Je vois des rues vides, des infrastructures délabrées et des jeunes piétinés. Les jeunes leaders qui faisaient parti du Printemps arabe sont presque tous toujours en prison. Ceux qui étaient alors très jeunes et qui parlent maintenant au nom des jeunes affirment que le soulèvement n’a pas eu beaucoup de résultats, qu’il a plutôt engendré davantage de problèmes. Je réfléchis à cela et je me demande si nous savons ce que le terme révolution veut dire. James Omen résume assez bien ce sentiment pour moi.
James Onen
1. Il semblerait que quelques critiques commencent à piquer au vif. C’est une bonne chose. Mais peut-être qu’au lieu de mettre encore en avant son propre sentiment de grandeur, il devrait passer quelques semaines loin des caméras et consacrer du temps à développer des idées politiques intéressantes et une meilleure compréhension de la politique et des systèmes.
James Onen@jamesonen
5. Tout le monde pensait que le « Printemps arabe » allait apporter un changement dans les pays d’Afrique du Nord. Mais les nouveaux régimes sont encore plus répressifs que les anciens ! Le simple fait que vous vouliez introduire un changement ne signifie pas que l’on vous soutiendra aveuglément.
Bâtir des alliances
Lydia Namubiru@namlyd
Bobi Wine a le pouvoir charismatique des célébrités pour remporter le vote populaire mais il doit étoffer ses positions politiques. Si nous considérons la transition après Musevini comme un projet collectif, ceux qui ont passé des années à critiquer le NRM et à proposer une autre politique, chercheront à profiter de sa haute destinée.
Jusqu’à présent, Bobi Wine a réussi à faire une chose : se présenter comme faisant partie de l’opposition. Mais il n’a pas réussi à joindre ses forces aux autres acteurs plus âgés de la lutte contre le régime de Yoweri Museveni. L’opposition en Ouganda est tellement fragmentée que je me demande s’il ne s’agit pas que d’une simple bande de carriéristes.
Je connais quelques personnes qui ont été déprimées pendant un bon moment après l’échec du TDA en 2016 – la prétendue alliance de l’opposition. J’aimerais voir se développer davantage d’alliances solides en prévision de 2021. Ce serait fantastique de voir tous les membres de l’opposition travailler ensemble. Mais ils doivent d’abord se mettre d’accord. Je me demande si BobiWine pense à cela.
La vérité, c’est que nous voulons tous de nouveaux dirigeants. Nous voulons être excités à l’idée d’écouter le Discours sur l’état de la nation, le Discours du Nouvel an et des discours qui commencent par autre chose que « quand nous étions dans la savane ». Mais nous devons également nous montrer très intelligents quant à la façon d’y parvenir.
Mon ami et mentor Brian Kagoro nous rappelle toujours ces paroles de Martin Luther King Jr : « Ceux qui aiment la paix doivent apprendre à s’organiser aussi efficacement que ceux qui aiment la guerre ». Nous ne pouvons nous montrer égoïstes si nous voulons libérer ce pays, cela doit être un effort collectif. Ce que BobiWine nous a montré dans cette émission télévisée, c’était qu’il ne s’entourait pas des bonnes personnes. C’est bien qu’il comprenne la lutte et les conflits des omuntu wa wansi (citoyens ordinaires) mais nous voulons aussi entendre parler des outils de politiques fiscales inclusives pour remettre l’économie sur les rails. Oui, Museveni doit partir mais il est nécessaire de planifier la vie après Museveni.
Certains ont déjà affirmé que cela n’avait aucune importance. D’autres ont déclaré que ce n’était que le début, qu’on devait donc lui faciliter les choses.
John Onen@Johnonen
Bobi Wine et le raffut : Dans un pays où la plupart des gens ont déjà choisi leur camp sur les questions politiques, savoir si vous comprenez la politique fiscale ou si vous croyez en l’irrigation à l’eau minérale n’a vraiment aucune importance. L’essentiel, c’est le Changement ou le Statu quo, point !
Cela ne compte-t-il vraiment pas si un candidat présidentiel qui a quelques mois devant lui pour lancer sa campagne, n’a aucune idée de la direction économique qu’il souhaite voir le pays adopter – à l’avenir ? Même pas une idée approximative ?
Pour Dieu et mon pays.