La Côte d’Ivoire traverse une période de paix, mais court après la réconciliation depuis plus d’une décennie.

Les politiques qui, normalement, devraient inspirer cette paix n’ont, semble-t-il, pas encore trouvé la meilleure inspiration qui y mène. Et de tâtonnements en balbutiements, la réconciliation est en train de se transformer en un sacré luxe pour les dirigeants politiques ivoiriens et leurs populations.

Des entités comme la Commission dialogue vérité et réconciliation (CDVR) mises sur pieds pour résoudre la question de la réconciliation ont accouché d’une souris, malgré les milliards de francs Cfa du contribuable engloutis dans ces initiatives.

À la lumière des derniers événements qui ont marqué l’actualité politique ivoirienne ces derniers mois, notamment le divorce du Pdci d’avec le RDR, les élections locales entachées de violences, la réforme de la Commission électorale indépendante (CEI) exigée par l’opposition et les échauffourées liées à l’acquittement de Laurent Gbagbo, on est en droit de se poser des questions quant à l’effectivité de la réconciliation prônée par tous.

Le transfèrement de l’ancien président Laurent Gbagbo à La Haye est un point de discorde entre une partie de la population, l’opposition et le pouvoir en place.

Huit ans après, le procès de l’ex6chef d’État et de son ministre de la Jeunesse Charles Blé Goudé poursuivis tous deux pour crimes contre l’humanité à l’issue de la crise postélectorale de 2010-2011 divise toujours.

Leur acquittement prononcé le mardi 15 janvier 2019 par la Cour pénale internationale (Cpi) a donné lieu, d’une part à des liesses de militants et sympathisants, et d’autre part à des manifestations de protestation dans des quartiers d’Abidjan et villes de l’intérieur du pays.

En attendant de connaître la décision de la Chambre d’appel sur le recours de la procureure à la Cpi, Fatou Bensouda, sur la libération de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, les associations en charge des victimes de la crise postélectorale de 2011 en Côte d’Ivoire ne parlent pas le même langage.

La Fédération des victimes de la crise postélectorale en Côte d’Ivoire (Fenavipelci) s’est ‘’désolidarisée’’ du Collectif des victimes en Côte d’Ivoire (Cvci), qui a, pour sa part, protesté contre la libération de Laurent Gbagbo et son codétenu à La Haye.

« En tant qu’association des victimes notre rôle, c’est de prôner la cohésion sociale, c’est aller au pardon. Ce n’est pas en révoltant les victimes qu’on va arriver à la réconciliation. », a affirmé le président de la Fenavipelci, Coulibaly Mamadou Soromidjo au cours de la conférence de presse animée le samedi 19 janvier 2019 au siège de l’association.

L’amnistie accordée à plus de 800 prisonniers politiques par le chef de l’État, Alassane Ouattara, avait pourtant donné ce qu’on pouvait appeler un coup d’accélérateur au processus de la réconciliation. En effet, le geste du président de la République avait, un tant soit peu, apaisé les esprits, voire les cœurs.

Mais faut-il le reconnaître, et c’est dommage, l’épisode du procès de l’ancien président Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé semble avoir mis du plomb dans l’aile de la réconciliation en plein décollage.

La balle est désormais dans le camp des dirigeants politiques, seuls garants, de la paix, de la stabilité sociale.