Sa venue en RDC était prévue en juillet 2022 avant d’être reportée sine die pour des raisons de santé du souverain pontife. Cette fois est la bonne. Le pape François est bel et bien arrivé à Kinshasa mardi 31 janvier 2023 pour un séjour de quatre jours. L’ambiance était à la fête dans la capitale congolaise, et l’événement retransmis en direct à la radio-télévision nationale.

Le souverain pontife a été accueilli à l’aéroport international de Nd’jili par le Premier ministre congolais Sama Lukonde et plusieurs prélats catholiques locaux, dont l’archevêque de Kinshasa, le cardinal Fridolin Ambongo. Il a ensuite été reçu au palais présidentiel par le chef de l’État Félix Tshisekedi. La dernière fois où un pape était au Congo, c’était il y a 38 ans en 1985, et c’était le pape Jean-Paul II. 

Un important dispositif de sécurité pour cette première visite du pape François en RDC. Sur la route, des centaines de milliers d’habitants de la capitale congolaise en liesse étaient massés tout au long du parcours jusqu’au centre-ville pour saluer celui que l’on appelle le Saint-père qui passait majestueusement à bord de sa papamobile. « Enfin, il est là ! Vive le pape ! », exultaient les fidèles catholiques sur la route en provenance de l’aéroport. Pour eux, recevoir le pape, c’est une bénédiction qui n’arrive pas tous les jours et il faut en profiter. Cette visite du souverain pontife a pour thème : « Tous réconciliés en Jésus-Christ. »

Message du pape : paix, réconciliation !

Au palais de la nation, siège de la présidence de la RDC, le souverain pontife a eu un tête-à-tête avec le président Félix Tshisekedi. Ils ont ensuite prononcé chacun un discours devant les invités, notamment les représentants de la classe politique congolaise, des membres de la société civile et le corps diplomatique. 

Dans son discours, faisant allusion à l’indifférence de la communauté internationale vis-à-vis des atrocités qui se commettent en RDC, le souverain pontife a déclaré : « On a l’impression que la communauté internationale s’est presque résignée à la violence qui dévore le peuple congolais. Nous ne pouvons pas nous habituer au sang qui coule dans ce pays depuis des décennies, faisant des millions de morts. »

Dans le contexte des tensions politiques à Kinshasa, mais aussi de guerre et de violences contre des civils dans l’est du pays, le pape a délivré un message de réconfort, de paix, d’espérance et de bénédiction. Mercredi 01 février, il a célébré une messe en plein air devant près d’un million de personnes sur l’espace aménagé pour la circonstance à l’aéroport militaire de Ndolo à Kinshasa. Il est prévu au programme, une rencontre avec les jeunes Congolais au stade des Martyrs de Kinshasa. 

En raison du risque sécuritaire très élevé dans l’est de la République démocratique du Congo, la tournée du pape à Goma, ville située à la frontière avec le Rwanda, a été annulée. La région est un sanctuaire de groupes armés, dont les rebelles terroristes ADF affiliés à l’État islamique qui, ces derniers mois, a revendiqué plusieurs attaques meurtrières dans l’est de la RDC. Il y a aussi cette guerre entre l’armée et les rebelles du M23, « soutenus par le Rwanda ». Mais à défaut de se rendre à Goma, le souverain pontife a reçu ce mercredi à Kinshasa les délégations de représentants de victimes de guerre et d’atrocités de l’est du pays.

Une Église catholique très influente en politique congolaise 

Avec 45 millions de catholiques, la République démocratique du Congo héberge la plus importante communauté catholique du continent. À cela, s’ajoutent les protestants et les églises évangéliques. 

Du fait de son implication en politique congolaise, l’Eglise catholique exerce une réelle influence sur la vie publique en RDC. Elle a été de tous les combats politiques dans l’histoire du pays. De la Conférence nationale souveraine, passant par le Parlement de transition dans les années 90, aux élections de 2006, de 2011 et de 2018, sans compter les marches pacifiques citoyennes… Bref, l’Eglise catholique joue un rôle de contre-pouvoir en République démocratique du Congo. Ses relations avec les différents régimes au pouvoir à Kinshasa ont toujours été tendues.

Ainsi, l’arrivée du pape en RDC est pour plusieurs une occasion de réconcilier les Congolais avec eux-mêmes, par exemple sur le volet des préparatifs des élections. Le pays est actuellement en plein processus d’enrôlement et d’identification des électeurs. Pourtant, alors que s’approchent les élections générales prévues en décembre 2023, bon nombre de parties prenantes au processus électoral, notamment les partis de l’opposition, ne font pas confiance à l’actuelle Commission électorale nationale indépendante (Céni). Ils jugent son président trop proche du chef de l’État Félix Tshisekedi. Par exemple, le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie) de l’ancien président Joseph Kabila se dit non concerné par le processus électoral. 

Le pape va-t-il conseiller à Tshisekedi de jouer la carte de l’inclusivité électorale ? Car, les élections, la rébellion du M23, « l’agression rwandaise »… Ce sont des sujets brûlants, parmi tant d’autres, sur lesquels les Congolais aimeraient que le pape François émette, ne serait-ce qu’un avis au cours de son séjour en RDC.

 

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