Vous avez déjà vécu ce moment quand quelqu’un dit quelque chose auquel vous avez pensé mais que vous n’avez pas su exprimer avec les bons mots ou même pas pu dire parce que vous ne pensiez pas que c’était important.

Je suis désolé de trainer en longueur, mais c’est ce qui m’est arrivé en écoutant M. John Githongo lors d’une conférence à laquelle j’ai participé il y a quelques semaines. Et oui, il s’agissait d’un événement de l’Union africaine (l’UA peut parfois créer des moments de « prise de conscience »).

Je dis ça parce que c’était une « discussion de prise de conscience ». Le type de discussion que vous n’entendez pas souvent dans les conversations tenues par les gouvernements et l’Union africaine.

Je suis optimiste. Un afro-optimiste. Très ouvert d’esprit et clairvoyant, en particulier sur le fait que nous parlons de l’Afrique. Nous avons nos problèmes mais j’aime penser qu’ils constituent des « opportunités de croissance ». Pour un continent qui était autrefois condamné – nous nous en sortons bien et pouvons faire bien mieux.

Les jeunes d’Afrique m’encouragent, ce qui alimente mon optimisme. Les jeunes qui se débattent dans le monde et dont les gouvernements ne cessent de leur parler du statut de classes moyennes qu’ils ne voient pas venir mais continuent d’espérer. Des jeunes qui contre toute attente se font entendre, et sentir leur résolution.

C’est ce que John Githongo avait notamment à dire :

« Nous pouvons maintenant sentir ce phénomène sur tout le continent. Avec une population de jeunes impatients en matière de gouvernance et avides de changement. Nous voyons donc les débuts de grondements dans des pays comme le Gabon, le Togo, l’Ouganda. Il existe une narration commune d’une jeunesse fatiguée de la mauvaise gouvernance et de la corruption sur le continent. Les jeunes de moins de 35 ans réalisant que garantir les moyens de subsistance, la santé, l’éducation et la sécurité de leurs propres enfants est chose précaire et qu’ils souhaitent remettre en question les institutions qui sont à l’origine de cette réalité ». Les jeunes sont éveillés et mènent des conversations en ligne et hors ligne plaidant pour le changement.

Ils ont été critiqués comme étant une génération plus connectée que jamais qui devait mieux s’organiser et de façon plus efficace. Et cela est vrai, les jeunes doivent s’organiser davantage dans leur communauté. Mais je pense également que l’une des langues que nous parlons est celle de l’innovation. C’est une manière de nous exprimer. Et nous excellons en la matière. Bien sûr l’avènement d’Internet et de la technologie a joué un rôle mais nous avons aussi notre mot à dire.

« Les jeunes d’aujourd’hui partout dans le monde sont très attachés aux questions d’inégalité, de corruption et d’absence de responsabilité. Dans de nombreux pays, ils agissent de manière très directe ». — M. John Githongo.

Les jeunes en Afrique font entendre leur voix pour plaider en faveur d’un changement. Ils utilisent Internet et les médias sociaux en faveur du changement. Les hommes politiques se présentant à des élections commencent à voir le rôle que les jeunes jouent et c’est pourquoi, quand ils font campagne, ils utilisent un langage attrayant pour les jeunes (mêmes s’ils finissent par truquer les élections).

« Il n’est plus possible pour un homme politique en Afrique d’être engagé dans un sérieux mandat électif sans mettre la corruption au centre de son programme. Des expressions comme : responsabilité, État de droit, aucun effort ne doit être épargné, sont des expressions que les leaders utilisent pour se faire élire ». — M. John Githongo.

Mais un élément de son discours qui a véritablement résonné en moi était celui du taux d’intégration en Afrique. À ce sujet, il a déclaré : « L’intégration sociale et culturelle de l’Afrique est en cours et elle devance toutes les initiatives gouvernementales établies ».

Et je suis d’accord, cela se produit de manière informelle et d’une manière que seuls les jeunes utilisent et reconnaissent. Son conseil à ce sujet était que les gouvernements et les institutions devaient repenser la façon dont ils abordaient l’intégration et peut-être dont ils interagissaient avec les jeunes sur le sujet.

Nous sommes très favorables à cette idée. Je ne sais à combien de groupes WhatsApp panafricains ou régionaux je participe. De nombreuses informations échangées chaque jour, émanant de tous bords, sur ce qui se passe sur le continent. Je reçois des appels d’amis dans les médias demandant mon opinion ou mes réflexions sur ce qu’il se passe en Ouganda afin qu’ils puissent en rendre compte dans leur pays. Aucun obstacle, juste des informations communiquées et racontées. Les institutions et les législateurs doivent alors chercher des moyens de fusionner l’informel et le formel, parce que nous avons besoin de l’engagement des deux côtés pour que l’Afrique puisse avancer.

Et alors que nous collaborons, n’oublions pas que les institutions ne sont qu’un reflet de la société – tel que l’a exprimé, encore une fois, John Githongo. Il est facile pour de nombreux jeunes, en particulier sur les réseaux sociaux, de penser que le monde idéal est ce qui existe sur les réseaux sociaux et d’oublier les sociétés dont nous sommes issus.

« Les institutions sont en définitive bâties par des gens sur la base de normes, traditions et cultures qui existent dans une société. Une institution est à la hauteur de la société et des individus qui la créent » — M. John Githongo.

Donc les gouvernements, le système judiciaire, les forces de l’ordre sont un reflet de la société. Et alors que nous nous organisons en tant que jeunes sur le continent, nous devons réfléchir à la façon de faire partie de ces institutions, car nous devons produire un changement et créer l’Afrique que nous voulons.