Comme beaucoup d’entre vous, j’ai pris une décision difficile le 8 mai concernant le parti pour lequel j’allais voter lors des élections nationales de l’Afrique du Sud ; la décision la plus difficile en la matière depuis 10 ans (si vous incluez les élections municipales).
D’une certaine manière, je considérais cela comme positif, car la concurrence est une bonne chose, et avoir différents choix sur un bulletin de vote présente plusieurs intérêts qu’il convient de considérer. Le fait qu’il ne soit pas évident de savoir pour quel parti voter est parfois le signe d’une démocratie plus mature.
Mais le fait qu’il s’agissait d’un choix difficile était également dû à des considérations négatives, à savoir que chacun des choix était épouvantable, et le sentiment de choisir l’option la moins mauvaise était plus fort que jamais.
Étant pragmatique et ayant passé des décennies dans d’âpres négociations au sein de comités, je sais que chaque option présente généralement des inconvénients. Il est néanmoinssouvent possible de se fonder sur un principe de base, et d’identifier une option en accord avec ce principe sur le long terme, même si elle pourrait l’enfreindre à court terme.
Ce réalisme nous permet souvent de pardonner des violations mineures de la confiance par des partis politiques, car nous savons qu’ils adhèrent aux mêmes valeurs que nous, mais sont contraints de chercher à réaliser ces valeurs par des moyens qui pourraient sembler compromettants mais peuvent se comprendre compte tenu des contraintes de la realpolitik.
Aujourd’hui, je ne peux faire confiance à aucun parti, il n’y a que des partis sur lesquels je pourrais miser (à contrecœur). Plus inquiétant encore, je ne crois même plus qu’il existe assez d’individus qui se soucient encore de la politique et de la cohérence pour qu’un parti politique prenne même la peine de faire semblant de croire en un principe, encore moins de le mettre en pratique.
Comme j’en parlais avec Greg dans le dernier épisode de notre podcast (l’épisode traitait de la liberté d’expression, mais nous avons également abordé les élections), l’époque de la participation civique à grande échelle semble appartenir au passé, à l’exception de situations de crise telles que la Campagne SaveSA (Sauver l’AS) pour destituer Zuma.
Si je me fie à ce que mes étudiants âgés d’environ 19 ans débitent sur leurs claviers, j’ai peu d’espoir que laparticipation augmente de sitôt. Et les « débats » récents sur la liberté d’expression concernant Steve Hofmeyr (non, Multichoice n’a rien fait de mal) et BLF qui s’est vu rappeler que « les terres ou la mort » était un discours de haine par le Tribunal de l’égalité (un jugement ahurissant) ne sont que quelques exemples récents illustrant que plus personne ne veut réfléchir, tout le monde préfère se servir de ses opinions comme d’une arme pour obtenir le résultat recherché.
Honnêtement, je ne vois pas comment nous allons pouvoir sortir de ce pétrin. Et mon pessimisme s’explique en partie par le fait que nous nous concentrons tous sur l’issue finale de notre précipitation à former des jugements, et interagissons en ayant recours à l’humiliation, en distribuant des mérites et tout ce qui s’en suit (et bien sûr, nous pouvons commencer à débattre de la plupart de ces termes mêmes), alors que les problèmes sont bien plus profonds : ils ont trait à ce qu’on nous apprend, si tant est qu’on nous apprenne même à réfléchir, à réfléchir à ce qui est important, et plus important encore, à discerner ce dont nous devrions nous soucier (et pourquoi nous devrions nous soucier de quoi que ce soit).
Lisez cet article pour constater l’inquiétante facilité avec laquelle des individus tombent dans le piège d’idéologies sérieusement nuisibles, et pour renforcer mon propos, comment ce phénomène ne se produit pas nécessairement dans une sorte de conversion damascène mais suite à des moments pouvant sembler insignifiants sur le coup.
Je voulais écrire sur l’affaire Hofmeyr, et j’espère le faire bientôt. Mais je me suis alors rappelé que ce cas n’est qu’un exemple d’une situation qui s’est déjà produite à de nombreuses reprises, et que ce que j’avais déjà dit (comme de nombreuses autres personnes) était de toutes façonsexactement ce que j’allais encore dire cette fois-ci.
Il semble donc parfois qu’il ne serve à rien de dire quoi que ce soit, ce qui, je pense, fait partie du problème. Dans tous les cas, si vous êtes éducateur (au sens large du terme, incluant les parents), veuillez contribuer à maintenir la civilisation sur le droit chemin, s’il vous plaît ? Je ne peux pas vous dire comment le faire, mais essayons de le faire.