La condamnation du leader du parti PASTEF, Ousmane Sonko, à deux ans de prison a mis le feu à la poudrière. La violence s’est emparée de plusieurs villes du Sénégal pour dénoncer un verdict jugé politique car écartant M. Sonko de la course à la présidentielle de 2024.
La rue s’embrase
C’était un verdict très attendu, il est venu avec son lot de morts, de violence et de destruction de biens. Le jeudi 1er juin 2023, Ousmane Sonko a été condamné par la chambre criminelle de Dakar à 2 ans de prison ferme pour corruption de la jeunesse et 20 millions de dommages et intérêts à payer solidairement avec la patronne du salon de massage Sweet Beauté où exerçait son accusatrice, Adji Sarr. Un verdict qui, en même temps, disculpe le leader du parti PASTEF des faits présumés de viol et menaces de mort pour lesquels il était poursuivi depuis deux ans et demi.
Une décision qui a soulevé l’ire des responsables, militants et sympathisants du parti PASTEF qui ont appelé à manifester jusqu’au départ du président Macky Sall. En effet, au-delà de la peine ferme, cette condamnation exclut Ousmane Sonko de la présidentielle de 2024 au regard des dispositions du articles L29 et L30 du code électoral.
Un scénario qui révolte les patriotes qui ont investi les rues pour exprimer leur colère. À Dakar, à Ziguinchor et dans d’autres endroits du Sénégal la violence était inouïe. Après trois jours de manifestations, le pays compte 16 morts, la plupart des jeunes âgés de moins de 30 ans. S’y ajoutent des scènes de pillages avec des commerces dévalisés puis incendiés, des stations d’essence vandalisées, l’université de Dakar saccagée, des véhicules et maisons incendiés. Le Sénégal, jadis modèle de stabilité et de démocratie offre ainsi à la face du monde le visage d’un pays profondément divisé.
Appel au calme
Face à cette vague de violences tragiques, des voix s’élèvent pour appeler au calme et à la préservation de la démocratie sénégalaise qui a toujours été présentée en modèle en Afrique. La CEDEAO, l’UEMOA, la France, l’Angleterre, les États-Unis ont exprimé leurs préoccupations et appelé les acteurs politiques à moins de passion pour un retour au calme.
Au plan local, des autorités religieuses et plusieurs porteurs de voix (footballeurs, artistes, activistes) sont montés au créneau pour un retour au calme. Paradoxalement, ces incidents surviennent au lendemain du lancement du dialogue national initié par le président Macky Sall et auquel la majorité des partis d’opposition et certaines organisations de la société civile ont refusé de répondre.
Toujours est-il, malgré la désescalade observée ces dernières heures, la situation reste encore tendue avec le déploiement de l’armée à certains endroits stratégiques. En effet, du côté de l’État on évoque l’infiltration du pays par des « forces occultes et subversives » qui ont pour mission de profiter des manifestations pour semer le chaos. D’ailleurs des images de supposés manifestants armés de pistolet et de fusil sont exhibées par le gouvernement pour étayer cette thèse.
Pour l’heure les deux camps pouvoir et PASTEF se regardent en chiens de faïence, chacun campant sur ces certitudes, ce inquiète les populations à Dakar et à Ziguinchor dont Ousmane Sonko est le maire. Pour le moment la capitale sénégalaise offre le décor d’une ville à l’arrêt avec banques et commerces fermés. Les prochains jours s’annoncent décisifs.
Photo: Alisdare Hickson/flickr (CC BY-SA 2.0)