« La démocratie n’est pas une bouteille de Coca-Cola qu’on importe » – Mwalimu Julius Nyerere

J’ai été particulièrement agacé par la manière dont nos compatriotes ont utilisé les médias occidentaux pour représenter le prétendu affaiblissement de la démocratie en Tanzanie. « Bouleversements au Kenya, politiques en Ouganda et campagne de répression en Tanzanie », affirme l’une de ces agences dans un article intitulé Brawls, Autocratic Moves Threaten East African Democracy (Querelles et mouvements autocrates menacent la démocratie en Afrique de l’Est). Mais la situation est-elle aussi catastrophique ?

J’ai ainsi trouvé rafraîchissant de lire le tweet du professeur Ian Bremmer indiquant que la Tanzanie, comme l’Inde et la Suède, comptait le plus haut pourcentage d’individus (c.à.d. 79 %) se disant « satisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays ». La dose de scepticisme véhiculée par les critiques en Tanzanie et l’attitude défensive adoptée par les partisans du régime m’ont renvoyé au document d’origine.

En effet, l’étude menée par le Pew Research Center ‘Globally, Broad Support for Representative and Direct Democracy (Un soutien général à la démocratie représentative et directe au niveau international) publiée le 16 octobre 2017 indique que nous sommes parmi les premiers. « En Tanzanie, au Ghana, au Sénégal et au Kenya », affirme-t-elle « la majorité affirme que la démocratie fonctionne bien » (p. 14). Mais ce n’est pas tout.

Concernant la mesure dans laquelle nous « avons confiance en le gouvernement national pour faire ce qui est bon pour notre pays », les 79 % sont quasiment divisés en deux catégories, 48 % indiquant avoir « pleinement » confiance alors que 41 % affirment avoir confiance « dans une certaine mesure ». Étant donné que mon intérêt pour ce blog vise simplement – peut-être avec crédulité – à interpréter les résultats du Pew Institute, voici ses interprétations de base de ces différences manifestes.

« Les attitudes sur le fonctionnement de la démocratie sont étroitement liées à la confiance du public en leur gouvernement national. Les individus qui sont satisfaits de la manière dont la démocratie fonctionne dans leur pays tendent également à dire qu’ils ont confiance en leur pays pour faire ce qui est bon pour le pays » (p. 16)

Autre détail intéressant, Pew additionne les 48 % ayant affirmé être très satisfaits aux 41 % ayant affirmé être satisfaits dans une certaine mesure pour obtenir un total de 89 %. On ne peut que se demander ce que nous –Tanzaniens toujours prudents – voulons dire par « dans une certaine mesure ».

Paradoxalement, seulement « 53 % des… Tanzaniens considèrent que la démocratie représentative est une bonne chose » (p. 20). Cela nous amène à nous demander quel type de démocratie les 79 % considèrent satisfaisant.

Est-ce une autre version, qui fait que 39 % d’entre nous affirment qu’un système dans lequel un leader fort peut prendre des décisions sans interférence du Parlement ou des tribunaux est « parfaitement approprié » (p. 26) ? Bien entendu, 57 % d’entre nous ont répondu que cela était « totalement inapproprié », et 39 % affirment que c’est « très inapproprié » (Ibid). Mais 39 %, n’est-ce pas plus d’un tiers des Tanzaniens ?