L’enregistrement audio divulgué d’une conversation entre l’épouse de Mnangagwa, Auxillia, et d’un commandant de l’armée dénommé Murombo, a mis au jour les luttes de pouvoir au sein de l’administration baptisée “NewDispensation”. Dans l’enregistrement, Auxillia Mnangagwa prétend que l’armée essaye d’atteindre « Mnangagwa à travers elle », affirmant clairement que tout ne se passe pas bien et que l’armée cherche à destituer Mnangagwa.

Ces révélations donnent raison à mes postulats présentés dans mon précédent blog, dans lequel j’avais averti que le Zimbabwe était au bord d’un nouveau coup militaire basé sur l’échec lamentable de Mnangagwa de gérer la transition et de remédier au coup d’État. Je posais comme postulat que le fantôme de novembre 2017 continuait à nous hanter, et que cela constituait un appel lancé aux forces progressistes de définir et de mettre en œuvre un programme d’action politique pour écarter le ZANU PF du pouvoir.

Il est maintenant évident que le système qui a remplacé Mugabe n’a rien de nouveau, malgré les appellations à la mode, comme 2e République, New dispensation, dont on le dépeint. Il est aussi ancien qu’il ne l’était durant Mugabe, la seule nouveauté étant l’écharpe vaudou que le président revêt même lorsque les températures sont très élevées, et est aussi devenu le symbole de l’échec de Mnangagwa.

En tant que dirigeant qui a succédé à Mugabe, Mnangagwa s’en sort jusqu’à présent très mal, car après avoir obtenu le pouvoir politique, il n’a pas su l’utiliser pour transformer la société et plus important, l’économie. Il est tout à fait consternant de penser que c’est un homme qui, pendant des décennies, a voulu être président, et de s’apercevoir maintenant qu’il ne souhaitait que porter une écharpe, passer son temps dans des voyages sans fin à l’étranger et dans la débauche. L’administration de Mnangagwa a vendu un imbécile au peuple du Zimbabwe, elle n’a pas tenu sa promesse de transformer et réformer les systèmes de gouvernance, d’améliorer l’économie en vue d’améliorer les moyens de subsistance des Zimbabwéens.

La seule réussite de Mnangagwa ait d’avoir réussi à destituer un dictateur impopulaire, détesté et craint, et ce changement de pouvoir a clairement été accueilli avec beaucoup d’espoir et de satisfaction. Cependant, je m’empresse d’ajouter que le coup d’État n’était en aucune façon révolutionnaire, dans le fond et dans la forme, bien que les masses l’aient soutenu, l’élément révolutionnaire se limitant probablement uniquement aux discours des conspirateurs militaires, selon lesquels il s’agissait réellement d’une « révolution du peuple ».

En conséquence, on peut avancer que le coup d’État a exercé une influence excessive dans le monde politique du Zimbabwe, et qu’il a abrogé la loi suprême du pays, à savoir la Constitution, et donc compromis l’esprit constitutionnaliste au Zimbabwe. C’était une action illégale qui n’aurait jamais dû se produire et qui établit un précédent dangereux pour notre pays. Dumisani Muleya, dans son article, Coup: Of usurpers and judges, publié dans le Zimbabwe Independent le 20 juillet 2018, a émis comme postulat qu’à chaque fois qu’un coup militaire se produit n’importe où dans le monde, l’Exécutif, le Législatif et le Judiciaire sont généralement secoués dans leur fondement ou s’effondrent.

Cela est en grande partie vraie, en particulier si nous examinons de plus près le Judiciaire. De plus, depuis la prise de pouvoir, les actions du gouvernement issu du coup d’état ont montré le même mépris total de la Constitution, si l’on en juge par les nombreuses illégalités que nous pouvons constater depuis le moment où ils ont pris le pouvoir. Concernant le Judiciaire, un bon exemple est le jugement choquant de la Haute Cour du 24 novembre 2017, qui a estimé que la prise de pouvoir par l’armée ayant mené à la démission de l’ancien président, Robert Mugabe, était légale et ne constituait donc pas un coup d’état.

Dans le même temps, un autre tribunal a jugé que la destitution de l’ancien président adjoint de Mugabe, le président actuel Emmerson Mnangagwa était illégale, et cela suscite des craintes quant à l’indépendance de l’appareil judiciaire. Surtout, les Zimbabwéens sont maintenant gouvernés par décrets, l’amendement de quelques lois essentielles ayant été réalisé par des ministres, usurpant ainsi le rôle du parlement, comme cela s’est produit pour la loi S1 142 de 2019, qui constitue une violation nette de la Loi sur la Banque centrale du Zimbabwe.

On peut également avancer que le coup d’état était nécessaire pour divulguer où se trouve le pouvoir réel. Les Zimbabwéens ont maintenant affaire au pouvoir réel derrière la façade de Mugabe, le véritable ennemi et le gros problème dont personne n’ose parler : l’armée. L’ennemi se trouve maintenant face à nous, à la vue de tous. Il ne se dissimule plus, Mugabe n’était que sa figure de proue. Cela appelle donc à réviser les stratégies, en particulier pour les forces sociales et politiques progressistes, quant à la façon d’affronter la bête. La propension du régime à avoir recours à la force en réaction aux manifestations pacifiques montre qu’il panique et que sa seule option est la violence.

Cependant, il est maintenant devenu clair qu’à long terme, s’ils continuent à être continuellement exposés, le recours à la force brute prendra fin. A ce jour, le régime issu du coup a surpassé Mugabe au cours de ses 37 ans au pouvoir, quant au nombre élevé de militants accusés de trahison. Les menaces de déploiement de l’armée par le ministre de la Défense, Oppah Muchinguri, pour réprimer les troubles civils, montrent que la force brute est la seule langue qu’ils comprennent. C’est dans ce contexte que j’avance que le pouvoir brutal devra être amené à la table des réformes, la force est accablante mais elle finit par faire réagir le peuple.

Dans le contexte de la situation actuelle, les forces sociales et politiques progressistes du Zimbabwe doivent rapidement se réengager, se remobiliser, se réorganiser et se regrouper pour bâtir un autre pays, par le biais d’une action politique durable. Cela ne viendra pas de l’effondrement de l’économie ni d’unmoment à la Sarajevo. Les citoyens ont besoin d’un leadership décisif. L’action politique radicale durable sur le terrain est la seule issue de sortie du Zimbabwe. Le ZANU PF ne bougera pas sans une pression croissante ; se précipiter dans un autre gouvernement d’unité nationale ne serait que suicide et marquera la fin de la politique d’opposition au Zimbabwe.

En conséquence, les forces progressistes doivent travailler sur un programme d’action de mobilisation massive, qui permettra de reprendre le pouvoir politique des mains du ZANU PF. Saisir l’État est le principe de base sur lequel le Zimbabwe peut être protégé de la corruption, de la convoitise, de la médiocrité, d’une orientation qui ne mène nulle part et marque le mépris du gouvernement actuel pour les intérêts économiques du peuple. Quiconque accepte et considère que le ZANU PF mènera la société vers une émancipation économique vit sur la lune.